Tout au long de la pièce comico-satirique, on rit, on se dégargouille, on se tient par les tripes, on trottine par terre, mais le message de la pièce “Demain nous jouerons du théâtre” de Paul Pingwinde Zingrouna reste clair et net : Rester debout. Si tu l’as ratée hier, voici pourquoi tu dois te rattraper ce 14 ou 15 octobre.
Pour vous la faire court ; Un directeur de troupe,Sidnooma décide de créer un spectacle de théâtre. Il rencontre sur son chemin plusieurs propositions de financement teintées de mercantilisme, qu’il esquive. Il ne réussira pas à mobiliser le moindre sou pour son projet. Comble de malheur, sa femme le quitte. Acculé, il finit par faire un acte de pure folie : prendre en otage le département théâtral. En effet, le département doit à sa troupe un financement signé depuis 5 ans, Sidnooma est tué dans cette prise d’otage.
C’est le prologue, une tirade plein d’ironie où les félicitations pleuvent, alors que les “mais” abondent, qui donne le ton : « L’art en général et le théâtre en particulier sont un creuset, une tribune de cohésion sociale mais… – Oui, nous saluons votre initiative mais nous n’avons pas de ligne budgétaire pour des activités culturelles. – Oui, nous accusons réception de votre demande de partenariat mais… – Nous sommes convaincus qu’un tel projet contribuera efficacement au changement de comportement et de mentalité de nos populations mais … – Mais, mais oui Nous sommes au regret de ne pouvoir répondre favorablement à votre requête – Ok, votre projet est très pertinent et d’une grande actualité. Cependant … – Non, non, non c’est nous qui vous félicitons pour cette merveilleuse idée pour la promotion de la culture. Mais… – Mais… – Cependant… – Nonobstant – Au regret… – Malheureusement… », dès le départ, le spectateur sait à quoi s’attendre, une remise en question profonde du statut d’artiste, ou encore pour dire mieux, une mise à l’épreuve.
Dans l’océan des incertitudes, manque de financement et autres difficultés, Sidnooma devra aussi faire face aux membres de sa troupe. Ceux-ci en mal de trouver ne fût-ce que de quoi subvenir à leurs besoins les plus basiques, n’hésitent pas de lui jeter à la figure que s’ils sont dans le désarroi, c’est à cause de ses mauvaises décisions. Il aurait pu par exemple, les laisser s’évaporer dans la nature en France, à Avignon l’année précédente, ou marier la fille du consul qui voulait de lui : « une très grande stratégie qui leur aurait permis d’avoir assez d’argent. », lui rétorque un des membres de la troupe.
Rester debout et intègre malgré tout
Malgré que les conditions pour jeter l’éponge soient réunies, on découvre pourtant, un Sidnooma qui ne doute pas de son engagement.
Sidnooma c’est la fermeté jusqu’au bout, il en fait preuve lorsqu’il est invité par le président de l’association pour créer une pièce , Sidnooma décline l’offre pourtant alléchante, il fera ainsi même lorsqu’il sera invité de jouer une pièce de théâtre pour la publicité d’une banque. Quand un expatrié, représentant d’une agence de coopération l’invite à créer sur des sujets Tabou pour espérer un financement, Sidnooma droit dans ses bottes lui dira qu’il y a d’autres maux plus urgents et ainsi rejetter la proposition.
Malgré la promesse d’un financement à hauteur de 50 millions, Sidnooma reste incorruptible même quand sa femme le quitte, elle qui n’en peut plus de vivre avec un “homme égoïste, qui ne pense qu’à jouer du théâtre, un métier qui ne rapporte rien, au lieu de chercher un métier sérieux capable de leur faire vivre.”
Somme toute, les péripéties de Sidnooma nous invitent à nous questionner: jusqu’où pouvons-nous aller dans nos engagements artistiques ? La pièce nous exhorte à garder l’intégrité malgré tout.
Si jamais vous vous sentez désabusé, désapprouvé de par vos convictions, de par le métier de votre choix et de vos ambitions “Demain nous jouerons du théâtre”, écrite par Pingwinde Paul Zoungrana est la pièce à voir, la dose de motivation qu’il vous faut. La pièce jouée hier, est encore sur l’affiche ce 14 et 15 octobre 2022, à partir de 18h30.