Buja Sans Tabou

Avec une touche artistiquement choisie, la fiction est une fresque qui retrace ce que la société n’arrive pas à déchiffrer à elle seule. Entre clichés et réalités, Laura Sheilla Inangoma comme une guide touristique nous fait découvrir le(s) Ngagara.

L’œuvre est tout simplement magnifique. On découvre un quartier vieux de plus de soixante ans. Pendant près de six décennies, Ngagara fait parti de l’Histoire de notre pays. Sauf qu’il n’existe pas un seul Ngagara mais des Ngagara(s). Et chaque Ngagara possède ses particularités, ses habitudes,… Est-ce que l’auteure n’a pas eu du mal à nous parler de tous ces dix quartiers ?

Photo Crédit: iamartmel

Le génie de l’auteure

Comment aborder l’histoire d’un quartier dont les clichés et les petites histoires font partis des croyances populaires de notre pays, le Burundi ? Comment parler dans une seule pièce de théâtre, dix quartiers sans tomber dans le piège du fanatisme ou des “on dit” ? C’est là où se trouve alors le génie de l’auteure. On ne se perd pas. Chaque comédien/comédienne sur scène interprète le rôle de l’un des quartiers (en effet, Ngagara était une commune de Bujumbura avant de devenir une zone aujourd’hui qui possède dix quartiers. Pour désigner ces derniers on utilise un chiffre, de un à dix).

Photo Crédit: iamartmel

Cédric Bahimpundu a pondu un superbe article sur Ngagara lors du Festival Buja Sans Tabou précédent, “Il faut le dire, il n’y a pas Ngagara mais des Ngagara. Grâce à la machine à remonter le temps de Inangoma, l’on découvre par exemple qu’il y un Ngagara « des frimeurs », là où l’on se la joue millionnaire en se permettant des mets exquis pour demander « un petit crédit de boîtes d’allumettes dès les premières dates d’après les vingt du mois ». Il y a Gomorrhe, sacrée Gomorrhe, comme le nom fait penser à un petit coin réputé pour ses petites parties jambes en l’air !Dans ce quartier où les aubergines seraient plus succulentes que la viande, quelques zones d’ombres. Ce dénominateur commun culinaire et un faible pour une bouteille le soir ne sont pas suffisants pour faire penser à un quartier à l’unité sans accrocs.” écrit-il.

Laura Sheilla Inangoma a su user de son génie pour parler d’un quartier dont la complexité augmente encore plus la fascination.

Photo Crédit: iamartmel

Le fond oui mais la forme surtout !

On juge une œuvre écrite en mettant l’accent sur son fond et surtout sa forme. L’auteure arrive à écrire une pièce de théâtre dont le fond est bien sûr à saluer mais la forme a droit à des acclamations.

Elle avait devant elle dix quartiers dont l’histoire et la réputation (bonne ou mauvaise) demandent un recul avant de commencer le processus de création. Il n’est pas du tout aisé de parler de Ngagara même les historiens redoutent cette tâche si risquée et complexe. Inangoma a osé et elle a réussi avec brio.

La forme de “Ngagara, quartier immatériel” est d’une créativité rarissime. Faire parler les quartiers, naviguer entre les clichés, l’histoire et les “on dit” demande un talent immense. C’est pourquoi la pièce de Laura Sheilla Inangoma nous fascine autant, elle décrit le “réel” avec du talent.

La Comédienne Odile Sankara venue donner une formation sur le Théâtre à Bujumbura aurait lancé cette phrase :” L’art est une porte ouverte, très facile à emprunter. Tout le monde vient. Mais très peu savent se poser les vraies questions, en y mettant de la forme. Si la forme n’accompagne pas le fond, on s’épuise très vite. La poésie protège l’art”. Inangoma a su se poser les vraies questions et a mis de la forme dans “Ngagara, quartier immatériel” pour afin décrire le réel poétiquement !

1 Comment
  • Mugale
    6:52 AM, 14 juillet 2021

    Trop facile

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *